5h24. Devant mon clavier, je cherche mes mots, ceux qui
décrivent les maux qui me poursuivent au
fil des mois. Ces mots qui, mis bout à bout, décrivent une vie. Vie qui ne
tient qu'à un fil, vie qui ne veut pas en finir, du moins comme cela, vie qui
s'envisage qu'au jour le jour, jour de plaisir ou jour de douleur, jour de rêve,
rêve de vie ... il est 5h26... deux minutes de vie.
IRM, trois lettres pour décrire cette machine qui est là,
devant moi, dans laquelle je vais pénétrer dans quelques secondes. Machine
porteuse de crainte et d'espoir à la fois. Machine née du génie des hommes,
machine au service de l'homme, machine qui va lire en moi l'instant présent,
pour essayer de prédire un futur.
Mais avant cela, revenons un peu en arrière. Ce rendez-vous
avec la machine s'est fait attendre. Quinze jours au bout desquels, un simple SMS
me propose une date et un horaire. SMS auquel je dois répondre par oui ou par
non, pour poursuivre l'aventure. Le oui l'emporte majoritairement, mon débat
interne est clos.
Changer d'oncologue n'est pas une mince affaire. Il y a
d'abord ce débat avec toi-même qui t'agite. Est-ce le bon choix, qu'est-ce qui
te motive, y a-t-il un bénéfice à en tirer. Il y a aussi les scrupules. Quitter
ton ange gardien qui a fait un super travail, ce n'est pas très cool pour lui!
Et puis il y a les difficultés liées à la paperasserie. Un
appel de la secrétaire du nouvel oncologue." Je ne peux pas vous donner de
rendez-vous, vous deviez nous donner tous vos examens, et vous ne l'avez pas
fait!" Je ne peux traduire le ton
employé, mais il n'était pas particulièrement amical!
Un rendez-vous IRM qui
n'arrive pas, une secrétaire stressée qui m'agresse, alors que toutes
les conditions ont été remplies, autant d'éléments me faisant douter de ma
décision. Et puis voilà, après le rendez-vous IRM, arrive un courrier ... la
secrétaire a sûrement retrouvé les éléments manquants, car me voici nanti d'un
rendez-vous pour le 4 janvier!
C'est la semaine médicale. Mercredi, la saignée, calcium,
albumine et PSA. C'était le matin, de bonne heure, après avoir affronté le
brouillard, le froid et une heure
d'attente, c'est une fois de plus à la seringue que le précieux nectar est
prélevé. Il faut dire que mes veines ont gardé
les stigmates de mon dernier passage au scanner, rappelez-vous, celui
avec Lénine!
Mercredi soir, passage de la petite infirmière ( petite par
la taille, grande par le cœur). C'est le jour du décapeptyl! L'aiguille de gros
calibre perce mon quart supéro-externe ..... Jeeeee n'aaaarrive pas à comprendre le masochisme!
quel plaisir peut-on trouver à la douleur! Allez, la prochaine dans douze semaines!
Jeudi, je veille ma boîte mail qui va me délivrer les
résultats de mon bilan. Calcium, albumine OK, PSA en légère augmentation, mais
bon résultat. Rassuré je suis, il reste l'IRM.
Clinique Saint-Augustin. La première fois que je suis entré
en ce lieu, j'avais treize ans. Mon père venait d'y être admis, pour subir une
opération d'une tumeur au cerveau. A cette époque, point d'imagerie médicale.
On ouvrait pour se rendre compte en direct.
Le professeur chargé de cette opération s'était entouré
d'une dizaine d'étudiants. Ce n'est pas tous les jours que l'on a l'occasion de
voir cela! C'est donc au bistouri que cet homme a travaillé.
Je ne le savais pas encore, mais c'était la dernière fois
que je voyais mon père en pleine
possession de ses moyens. L'opération a été dévastatrice. Hémiplégie, perte du
langage et régression du comportement. Cela a encore duré un an avant qu'il ne
quitte ce monde. Il n'était plus que l'ombre de lui même.
Depuis ce jour je suis hanté par la crainte de la maladie,
de la mort, des hôpitaux et du corps médical. Et pourtant, je suis devenu
infirmier! Chaque fois que rentre dans
cette clinique, des images m'assaillent. Mais aujourd'hui, il y a l'imagerie
médicale!
Le plan sur lequel je suis étendu n'est pas vraiment
confortable, le dos n'est pas économisé, la mousse de rembourrage, si! C'est
parti! je glisse doucement dans la machine. Plutôt à l'étroit là-dedans! Petite
sensation d'étouffement, je ferme les yeux.
Un casque est rivé sur mes oreilles, afin de me diffuser de
la musique, censée atténuer le bruit infernal de la machine. Pour l'instant, il
n'y a que de la pub! et je ne peux pas changer de radio! Petite amélioration à
prévoir, un sélecteur de fréquence ...
Et puis la machine s'emballe ... j'ai le sentiment de
participer à une rave-partie ! musique électro à fond ! dans le casque, il y a
toujours de la pub. Le bruit de la machine se modifie. Me voilà descendu dans
la cale d'un gros navire marchand, section salle des machines. C'est le poum
poum d'un gros diésel qui va m'accompagner pour le reste de la séance. Dans le
casque il y a ...Nirvana!
Les chants magnétiques étant terminés, je retrouve la salle
d'attente. Je me sens serein. L'expérience était plaisante. Mais voilà l'heure du
verdict!
Il y a bien une lésion du corps vertébral antérieur de T11,
mais le radiologue se veut rassurant. Pas d'évolution notable et placée là où elle
est, elle ne va pas toucher la moelle épinière. Par précaution, il suggère une
radiothérapie de cette zone.
En clair, j'échappe donc au fauteuil roulant, du moins pour
l'instant. Il va falloir surveiller cette zone. Il ne me reste qu'à rencontrer
l'onco pour avoir son avis.
Nouvelles plutôt bonnes. J'entre dans une phase de
surveillance. En attendant, je reprends le cours de ma vie...
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