l'humanité est touchée par ce fléau que l'on nomme cancer. Ce mot qui fait peur, mot qui tant que l'on est pas touché, nous essayons de laisser loin de nos pensées. Pourquoi ce nom, Antidote, parce qu'aujourd'hui, je fais partie, de ces hommes et de ces femmes qui réalisent tout ce que cela implique, ce bouleversement majeur de sa vie. Sa vie ... elle ne tient qu'à un fil, l'espoir que la science à les outils qui vont te sauver. Alors Antidote pour essayer pour partager, échanger, se renseigner, exorciser sa peur , espérer... l'écriture pour aider.

25 avr. 2018

El picador !






La clinique, le lieu qui chaque quinzaine, va constituer le décor, la scène, un ailleurs, un autre espace temps ou va se jouer le combat orchestré par le médecin et les infirmières. Je viens pour la trentième fois leur confier ma vie... ils vont pouvoir jouer avec mon sang...

Dans la salle d’attente, je guette discrètement, je scrute sans fin les visages. Dans les reflets d’ombre et de lumière, je cherche les rides et les éclairs de vie. Pour le patient que je suis, et que nous sommes, c’est la quête éperdue vers un passé révolu, une illusion ? celle de la guérison, du retour à la pleine santé.

Le premier acte se déroule dans le bureau de mon ange gardien. Pour la deuxième fois, en 28 mois, il se rappelle mon nom. Sur l’écran de son ordinateur, défile le compte rendu des RCP (réunions de concertation pluridisciplinaires). Malgré des résultats biologiques en demi-teinte, le sésame vers la chimio m’est délivré.

Le deuxième acte va se jouer au cinquième étage. C’est l’entrée en scène des « picadors ». Celles qui sont sont chargées de planter l’acier dans le corps, afin de délivrer le poison. Dés mon arrivée, je les cherche du regard. Elles ne sont que trois ce matin.

Je distingue tout d’abord une infirmière d’un âge certain, qui, généralement, n’écoute jamais ce que je peux lui dire. il y a aussi la cadre du service, qui n’intervient jamais dans la salle de shoot. Son rôle est de distribuer les rendez-vous, gérer les plannings et parfois de distribuer les casques réfrigérants. Au fond du couloir, une jeune picador, qui, je l’espère va me prendre en charge.

Salle d’attente again. On se croise, on s’évite, on se frôle, entre deux portes on se sourit, on lâche quelques mots...

 À travers une vitre, je m’oublie. je vois dans la rue ces petites fourmis, qui s’agitent dans tous les sens pour remplir leur existence mécanique.

Mon nom résonne dans le couloir et je suis convié a me rendre dans la salle de shoot la plus éloignée, et de m’y installer.

Lorsque « EL PICADOR » est entré en piste, le temps s’est arrêté… la cadre du service ! le choc traumatique subi par l’animal que je suis a-t-il pour but de me tester dans ma bravoure ?

« El picador » n’est guère pressée à l’idée d’en découdre. Je décide de lui présenter ma plus belle veine... soyons positifs, elle va y arriver !

Pose du garrot, elle tapote, tapote, tapote... la veine gonfle, gonfle, gonfle... la banderille s’approche, sa main tremble, moi aussi. L’acier plonge dans le bras, transperce la veine et le bras ! La banderille semble alors prendre feu et la flamme brûle jusqu’au vif. 

Mais elle ne s’arrête pas là, fouille et fouille encore. Puis sort brutalement l’aiguille et dit sans me jeter un regard « je vais chercher ma collègue » me laissant là, le garrot a peine défait une grosse compresse sur le bras avec la mission de faire compression. C’était la pose de la banderille et l’estocade à la fois ! la trentième fêtée généreusement !

La jeune infirmière prend le relais, à mon plus grand soulagement. La perfection et la maîtrise du geste technique, qui dévoilent l’adresse, la grâce de la personne et son pouvoir de domination sur ces moments délicats ou l’estocade doit être pure, propre, nette.

J’apprécie ce moment ultime ou elle sort victorieuse, ayant surmonté ses angoisses et ou généralement elle exprime son soulagement, avec un sourire.

El picador number one va encore sévir au moment du retrait de la perf. A la hussarde ! la douleur est encore présente au bout de deux jours. C’est la dernière fois qu’elle s’approche de moi, je peux vous l’assurer.

Le troisième acte est celui du départ. Moment a partir duquel je vais devoir affronter seul ce combat qui va se mener entre la maladie, le poison et mon corps. Et ce n’est pas le plus facile. 

Cette semaine ma chevelure a décidé de me quitter. Un voyage en urgence s’est imposé chez ma généraliste, car j’ai frôlé l’occlusion intestinale. La mucite a pris ses quartiers dans la cavité buccale... Que du bonheur !

Mais je ne vais pas me plaindre. On peut tout vous prendre, mais il vous restera toujours vos rêves pour réinventer le monde qu’on vous a confisqué...

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